Entretien avec Thomas Fatôme, directeur général de l’Assurance maladie, dans Le Parisien

23 Mai Entretien avec Thomas Fatôme, directeur général de l’Assurance maladie, dans Le Parisien

Alors que leur mobilisation ne faiblit pas, Thomas Fatôme, directeur général de l’Assurance maladie, explique que le chiffre d’affaires de la profession ne baissera pas avec la réforme du transport sanitaire.

Depuis lundi, les taxis sont mobilisés en nombre contre la nouvelle convention encadrant leurs tarifs de transport de patients. Quelque 40 000 taxis sont conventionnés et véhiculent chaque année environ 3 millions de patients pour un montant qui a atteint 3,1 milliards d’euros en 2024 (+45 % en cinq ans) sur les 6,7 milliards dédiés au transport sanitaire.

Les nouvelles règles, qui doivent entrer en vigueur le 1er octobre, prévoient notamment un tarif national unique de prise en charge (13 €), un tarif kilométrique par département, le tout assorti de majorations. Pas du goût des taxis qui craignent une forte baisse de leurs revenus, jusqu’à 40 % pour ceux dont l’activité, surtout en milieu rural, est quasi exclusivement dédiée au transport sanitaire.

Plusieurs cortèges ont manifesté encore ce jeudi, notamment à Pau (Pyrénées-Atlantiques), fief du Premier ministre. Et surtout en Ile-de-France, notamment sur l’A6, l’A1, la N118 et sur le boulevard Raspail à proximité du ministère des Transports (Paris VIIè), leur point de ralliement. Les taxis y ont également dénoncé la concurrence des VTC, accusés de concurrence déloyale.

« Il vaut mieux organiser les transports de patients avec les professionnels plutôt que baisser nos taux de remboursement. »

Êtes-vous surpris par cette forte mobilisation ?

THOMAS FÂTOME : Nous faisons évoluer le modèle tarifaire, donc cela génère des inquiétudes, c’est normal. Mais depuis un an et demi, nous avons fait près de vingt réunions de négociation avec les représentants des taxis. Nous avons pris en compte leurs propositions et la copie finale est différente de la version initiale. Nous avons abouti à un système plus cohérent, plus lisible, plus équitable.

Les taxis vont-ils perdre 30 à 40 % de chiffre d’affaires comme ils l’affirment ?

Ce sont ni nos hypothèses ni notre volonté. Si nous avions cet objectif-là, cela signifierait qu’on projette de faire plus d’un milliard d’euros d’économies uniquement sur les taxis. Or, comme la ministre de la Santé, Catherine Vautrin, l’a rappelé, sur l’ensemble du champ du transport sanitaire — taxis, VSL, ambulances — l’objectif est dans la loi de finances de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2025 de 300 millions d’euros d’économies à horizon de trois ans.

D’où vient leur inquiétude, alors, selon vous ?

Il y a des interrogations légitimes, mais certaines évolutions leur sont favorables. Par exemple, aujourd’hui, le forfait de prise en charge est différent d’un département à l’autre. Et dans certains, il n’y a même pas de forfait du tout. Demain, il sera porté à 13 € partout, et même à 28 € dans les grandes villes, pour tenir compte de la perte de temps dans les bouchons. Autre évolution : les trajets de plus de 50 km pour aller à l’hôpital seront majorés de 50 %. Et, conformément à leurs demandes, on conserve un tarif kilométrique par département.

La réforme est quand même pensée pour réaliser des économies, donc les artisans et entreprises de taxis vont perdre de l’argent…

La très grande majorité des taxis seront gagnants avec ce nouveau modèle, car il s’appuie sur une logique de transporter davantage de patients. Avec deux leviers : d’abord, moins de retours à vide qui étaient jusqu’ici payés par l’Assurance maladie : si un taxi dépose un patient et repart avec un autre, il n’aura pas perdu d’argent par rapport à la situation actuelle où il repart à vide. Ensuite, plus de transport partagé. En prenant deux patients, le taxi verra sa course bonifiée de plus de 50 % (deux trajets facturés avec un abattement de 23% sur chacun). C’est moins coûteux pour l’Assurance maladie, sans enlever d’argent aux taxis. Nous organisons mieux le transport sanitaire pour que la dépense soit soutenable.

 

Propos recueillis par Maxime Gayraud dans Le Parisien.

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